Juin – sept 2008 à La Maison Rouge
Fondation Antoine de Galbert
10 bd de la Bastille 75012 Paris
La maison rouge a organisé pour l’été 2008, une exposition consacrée à la rencontre de deux œuvres : celle du peintre médiumnique Augustin Lesage (1876-1954) et celle du sculpteur autrichien Elmar Trenkwalder (1959-).
Deux œuvres distinctes en nombreux points – que ce soit par leur médiumIndividu qui semble produire des phénomènes psi de façon particulièrement intense ou fiable. Le terme "médium" provient à l'origine de la doctrine du spiritisme, qui affirme que le médium est un intermédiaire avec les esprits des défunts. En parapsychologie, on préfère utiliser le terme de sujet psi (en anglais : Psychic)., leur époque, ou encore la forme d’art à laquelle elles sont rattachées, Art brut et Art contemporain – mais produites par deux personnalités habitées par la croyance en la puissance quasi magique de l’œuvre d’art.
Le peintre Augustin Lesage a fait l’objet d’une étude à l’Institut Métapsychique International par le Dr Eugène Osty. (Cf. Osty, E., « M. Augustin Lesage, peintre sans avoir appris », Revue MétapsychiqueLe mot métapsychique fut suggéré pour la première fois par M.W. Lutoslawski dans un écrit polonais : Wyklady Jagiellonskie, à Cracovie en 1902, pour désigner des notions assez différentes de celles de Charles Richet. En effet, lorsque celui-ci, dans son adresse présidentielle à la Society for Psychical Research, en 1905, présenta ce mot, il fut, dit-il, unanimement accepté. Quentendait-il par métapsychique ? De même quAristote avait intitulé son chapitre sur les grandes lois de la nature qui dépassent les choses physiques : meta ta fusica, métaphysique, de même il nomma métapsychique la science qui, dépassant les choses de la psychologie classique, étudie des faits qui "paraissent dus à des forces intelligentes inconnues", humaines ou non humaines, "en comprenant dans ces intelligences inconnues les étonnants phénomènes intellectuels de nos inconsciences". Bref, la métapsychique est, dit-il : "La seule science qui etudie des forces intelligentes". Doù résulte logiquement sa distinction entre la métapsychique objective qui "mentionne, classe, analyse certains phénomènes extérieurs perceptibles à nos sens, mécaniques, physiques ou chimiques, qui ne relèvent pas des forces actuellement connues et qui paraissent avoir un caractère intelligent", et la métapsychique subjective qui étudie des phénomènes psychiques non matériels tels que la lucidité, cette mystérieuse faculté de connaissance quil attribue à une sensibilité dont la nature nous échappe et quil propose dappeler cryptesthésie. Ces deux aspects, objectif qui étudie des forces et subjectif qui étudie des phénomènes psychiques, se retrouvent dans la définition générale que Charles Richet donne de la métapsychique : "La science qui a pour objet des phénomènes, mécaniques ou psychologiques, dus à des forces qui semblent intelligentes ou à des puissances inconnues latentes dans lintelligence humaine ". Aujourd'hui le terme de métapsychique est a peu près synonyme de celui de parapsychologie. n°1, janvier-février 1928, pp. 1-35).
Extrait du dossier de presse
Le projet de lexposition est né dune intuition dAntoine de Galbert, fondateur de la maison rouge.
Acquéreur doeuvres des deux artistes1, il a associé leur démarche dans sa collection. Lorsquil a proposé
à Elmar Trenkwalder dexposer son travail aux côtés de peintures de Lesage, celui-ci a accepté, lui
révélant son inclination pour loeuvre du peintre médiumnique.
Augustin Lesage, ouvrier mineur à Ferfay dans le Pas-de-Calais, devient peintre à 35 ans après une
révélation dans une galerie de la mine. « Cest en janvier 1912 que de puissants Esprits sont venus se
manifester à moi, en mordonnant de dessiner et de peindre, ce que je navais jamais fait auparavant.
Nayant jamais vu un tube de couleurs, jugez de ma surprise, à cette nouvelle révélation : « Mais, dis-je
jignore tout de la peinture. Ne tinquiète pas de ce détail insignifiant, me fut-il répondu. Cest nous
qui travaillerons avec ta main ». Jai alors reçu, par écriture, les noms des couleurs et des pinceaux quil
me fallait et jai commencé à peindre sous linfluence des artistes planétaires, après que jétais rentré de
la mine, bien exténué de fatigue » (propos rapportés par Augustin Lesage en 1925).
Intégré au milieu spirite qui lui reconnaît les qualités de médiumIndividu qui semble produire des phénomènes psi de façon particulièrement intense ou fiable. Le terme "médium" provient à l'origine de la doctrine du spiritisme, qui affirme que le médium est un intermédiaire avec les esprits des défunts. En parapsychologie, on préfère utiliser le terme de sujet psi (en anglais : Psychic). « sa capacité à accueillir le message de lesprit invisible » il abandonne son activité de mineur en 1923 et se consacre entièrement
à la peinture jusquà sa mort.
Augustin Lesage dit et répète que ce nest pas lui qui commande sa main, ni son regard lorsquil peint. Il
explique (notamment dans les propos recueillis par le docteur Osty en 1927) quil ne sait jamais à lavance ce quil va peindre, et quil exécute ce que lui dictent les esprits de Marie (sa soeur décédée), Léonard de Vinci, Marius de Tyane
Comme le souligne Hubert Larcher et Michel Thévoz dans le catalogue de lexposition monographique consacré au peintre en 1989, le spiritisme, qui sest développé en Europe et aux Etats-Unis vers le milieu du XIXe siècle, notamment dans les régions minières du nord de la France et de la Belgique2, lui offre une explication satisfaisante. Pour Thévoz « Lesage a eu lastuce inconsciente de faire passer sa vocation picturale par le biaisPrésence de patterns ou de défauts particuliers pouvant introduire une modification arbitraire des résultats et faussant ainsi leur validité (ex : un dé non équilibré ayant tendance à faire sortir souvent le même chiffre). de la médiumnité spirite et de trouver ainsi une brèche dans le barrage
socio-culturel. Fallait-il que la confiscation de lart par la bourgeoisie fût rédhibitoire pour que la
prétention dun ouvrier de communiquer avec Léonard de Vinci apparaisse moins insensée que celle de
devenir peintre ! ». Aussi « de même quil travaille dans la mine sous la direction de Ferfay-Cauchy, de
même il peint sous la direction des esprits [
] et lorsquil vend ses tableaux, il les facture au prix exact
des factures et dun salaire horaire équivalant à celui du houilleur » (Hubert Larcher). « Je suis un ouvrier
à la disposition des esprits », déclare t-il.
Comme le houilleur qui a le souci de ne pas déséquilibrer le front de taille pour prévenir les risques
deffondrement, le travail est symétrique. Il peint ligne par ligne, de haut en bas, à la manière dun
miniaturiste mais sur des formats pouvant atteindre 9 m², déroulant la toile si elle est trop grande au
fur et à mesure de lexécution procédé qui influe sur la structuration de loeuvre en registres horizontaux réguliers. A partir de 1927, il intègre des représentations de visages, danimaux, de personnages tirés de mythes ou religions orientales, africaines et égyptiennes.
Après quelques expositions locales, il présente ses oeuvres à la Maison des spirites, puis aux Salons des
Beaux-Arts, dAutomne, et des Artistes Français, où il exposera chaque année à partir de 1934. Il
rencontre le romancier Arthur Conan Doyle et de nombreuses personnalités, et reçoit les honneurs de la
presse. Ces années sont aussi celles de voyages et de dexpositions au Maroc, en Algérie, en Egypte, en
Angleterre, en Ecosse, en Suisse, en Belgique. Période faste qui sinterrompt avec la guerre. Lesage cesse
de peindre en 1952. Il séteint en 1954 dans sa demeure à Burbure.
Lintérêt dElmar Trenkwalder pour loeuvre dAugustin Lesage naît quelques années avant son entrée
aux Beaux-Arts de Vienne, lorsquil découvre dans les pages dune revue une reproduction de la
première toile de Lesage[[Sans titre, 1912-1913, huile sur toile, 300 x 300 cm Collection de lArt Brut, Lausanne. Du fait de sa fragilité loeuvre ne peut être
présentée dans lexposition.]]. Une image qui le marquera et dont il identifiera lauteur quinze ans plus tard.
Au-delà de la symétrie, de lornementation, de la métamorphose, de lintégration de lanimé dans
linerte, qui sont quelques-uns des traits communs aux constructions architecturales imaginaires des
deux artistes, Lesage et Trenkwalder ont aussi tous deux une propension à manipuler un vocabulaire
emprunté à différentes traditions stylistiques pour produire une oeuvre où prédomine la fonction
symbolique.
Lexposition rassemblera un ensemble de peintures et de dessins dAugustin Lesage, et six sculptures de
grands formats dElmar Trenkwalder – dont deux nouvelles oeuvres produites spécialement pour cette
exposition accompagnées dune sélection de dessins.
Le corpus des oeuvres dAugustin Lesage comptera une trentaine doeuvres importantes dans le parcours
de lartiste, et représentatives de sa démarche : les premiers dessins médiumniques réalisés lors de
séances de spiritisme dans les années 1910, certaines grandes compositions qui marquent sa
consécration dans les années 1920, un choix parmi les oeuvres peuplées par une iconographie
égyptienne, et plusieurs compositions décoratives des années quarante.